L'ARTISTE

Jean Pierre LECUYER
graveur plasticien
Photo Nine Mozas Lecuyer



L'HOMME, L'ARTISTE par :

Alain Jean André Chroniques de la LUXIOTTE
Henri CLAUDE, Historien d'Art
La xylographie est un art de rigueur qui oblige à penser l'image de sa conception à sa réalisation en prévoyant tout au long de l'opération la portée de chaque geste. Créativité et technicité y sont intimement liées, la main intelligente menant une "économie de la ligne", modulant ses inflexions et ses épaisseurs afin que chaque surface à encrer porte le maximum d'efficacité narrative et émotionnelle. Si le graveur utilise traditionnellement des bois débités dans le sens du fil tels que le poirier, et le noyer, il exploite aussi toutes les possibilités des matériaux contreplaqués de l'industrie actuelle. A la recherche d'une force d'expression nouvelle, il utilise l'outillage électrique qui libère son geste en un jeu où il s'invente des règles nouvelles le conduisant à structurer des formes sans jamais les enfermer.
Dans cette activité aussi ancienne que le désir des hommes de multiplier les images à l'aide d'une matrice imprimante, se sont illustrés des artistes de tout premier plan tels Dürer, Holbein, Cranach, Baldung Grien, Altdorfer ou, en Lorraine, Gabriel Salmon et les Woeriot, tout comme les maitres de l'estampe japonaise ou, plus près de nous, Gauguin et les expressionnistes. Jean Pierre Lécuyer qui n'ignore pas que "dans bien des esprits, parfois même "cultivés", la xylographie est synonyme d'un art passéiste, voire "folklorique", mesure les difficultés à assumer un si lourd héritage: "...une trop longue et trop belle lignée - écrit-il - fait parfois de nous de malheureux rejetons...". Il estime pourtant, sans vanité mais avec cet optimisme têtu qui est le fond de sa nature que cette activité "durera tant qu'il y aura des arbres et des hommes"..."Il y aura toujours - ajoute-t-il - un potentiel d'images fascinantes à partir d'une bonne vieille planche".
Dans son atelier "la maison du bois gravé", situé dans les Hautes Vosges, les images qu'il fait surgir de ses bonnes vieilles planches sont en effet fortes, neuves et vigoureuses. Il retrouve intacts "... Les premiers enchantements de l'enfance. Le premier amour pour le bois des forêts, matériau de mes cabanes, de mes petits moulins sur les ruisseaux, de mes bateaux taillés au canif et, de la table d'école support des gravures clandestines..."

Aujourd'hui, l'oeuvre gravée de Jean Pierre Lécuyer trouve un prolongement avec ses collages colorés issus de la récupération d'épreuves d'essais de maculatures typographiques astucieusement assemblées avec des rehauts d'acrylique qui épousent matières et couleurs en un jeu de modelés subtils.
Tout cela plein de sincérité, de sève, de verdeur, mais aussi d'invention ludique, de drôlerie, de trouvailles insolites voire d'humour décapant : il démonte avec délectation les ressorts des vanités et comme l'écrit Robert Besse avec qui il réalisa des poèmes-affiches "Ouvre des brèches dans les châteaux-forts de la bêtise..."
Henri CLAUDE, Historien d'Art.
Jean Pierre Lécuyer

BIOGRAPHIE :